Le cheval de maraîcher.





Le vieux cheval de maraîcher rêve à la gloire des coursiers.

Il songe amèrement aux erreurs du destin qui fait des uns des cracks, des autres des roussins.
 
 

Le vieux cheval de maraîcher, dans la lumière avare du carrefour, sous la pluie qui le cingle, a des rêves fougueux.
 
 

Il imagine des après-midis ensoleillés et qu'il a eu de l'orge et qu'il est habillé d'une robe qui luit. Il toise insolemment cette foule qui le contemple et qui l'admire. Il piaffe et il hennit. C'est sa façon de rire.
 
 

Car il a sur le dos un curieux passager tout coloré de bleu, de rouge et de vert-pomme, qui caresse son col et poliment lui dit qu'on va bien s'amuser à gagner le Grand prix d'Auteuil dans un fauteuil.


Le vieux cheval de maraîcher rêve déjà qu'il a gagné. Il sent ses pattes lui manquer. Une dure pluie d'or s'abat sur son échine. Les lumières rouges du triomphe le fascinent et dansent au fond de son oeil humide et lourd et mettent sur sa croupe un grand manteau de pourpre.
 
 

Une foule hurle son nom aux carrefours :

Cheval du maraîcher ! Cheval du maraîcher !..
 
 

- C'est trop, je vous en prie, que de cris, que d'amours !..
 
 

Le vieux cheval du maraîcher, sous la pluie et dans la nuit blême, voudrait tant aller se coucher...
 
 

C'est beau, la gloire, mais quand même on ne peut pas toujours rêver..


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