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La mante.
La mante religieuse, serrée dans son corselet
d'où part pour s 'évaser la jupe de tulle aux tons
si tendres qu'on se noierait dans ce vert d'eau..
Son oeil composé reflète à vingt cinq
mille exemplaire la profondeur glauque du buisson au sein duquel elle
se tient debout, priant Dieu qu'un beau mâle vienne lui faire
la cour.
Le voici devant elle, frêle, sec, jaune, dans la
posture de l'humble suppliant, face à la mante idéale.
Et chaque facette de ses yeux globuleux étincelle du feu des
désirs multiples. O la plus fraîche des mantes vertes !
C'est un prétendant sans prestige, mais elle a
toujours préféré les croquants. Elle
relève ses tulles, exhibant des dessous roses, et lui tend les
avant-bras. Elle a de ravisseuses pattes.
Leurs têtes de martiens orientent leurs antennes,
émettent : Mante, allo !
J'ai toujours admiré - dit-elle - vos articles..
Il est sur son dos large, fluet comme un jockey sur sa
pouliche. Suit une danse folle, une danse des mantes. Il s'accroche,
il sait que c'est une sauteuse.
Elle, tranquille, imagine un avenir immédiat
à l'abri du besoin. Et de ses mandibules acérées
elle effeuille une marguerite en murmurant : je l'aime, d'un amour
léger - profond - délirant - DEVORANT.
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