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Je suis une petite fille aux boucles blondes, née à Cognac chez ma grand'mère Marie D'AUMONT, dans le château de Javrezac le 4 avril 1914 . Mes Parents habitent SEVRES 24,rue Henry Régnau, face à l' ECOLE NORMALE .Avenue plantée d ' arbres jusqu'à BELLE - VUE à 20 mètres, au -rez-de-chaussée d'une villa de trois étages avec jardin. Le peti t pavillon du concierge se trouve à droite de la grille d'entrée. En pleine guerre pendant le trajet Sevres Cognac le train est bombardé. Plus de peur que de mal ! Ma mère Grosse de neuf mois arrive " en pleine forme " pour accoucher. J'ai maintenant deux ans, C'est la GUERRE, mon Papa , encore Suédois, n' est pas mobilisé. Il travaille chez " Renault mais a perdu sa place. Pour nous faire " vivre " Maman et moi, il a imaginé de construire lui-même un taxi avec des pièces de voitures récupérées de ci et de là.. Mais ce n' est pas suffisant, il faut aussi apprendre le plan de PARIS, le connaître à la perfection.Papa s'y met courageusement. - De la fenêtre de la cuisine, nous dominons tout Paris.Pendant les alertes, au lieu d'aller nous réfugier dans les caves de la Mairie comme tout le monde, mon Père éteint toutes les lumières, me drape dans un grand plaid, et dans ses bras j'assiste à un spectacle terrible,fantastique inoubliable. Une " SAUCISSE " reliée à un câbles nous garde..... Tout Paris est embrasé. Les feux de DCA se croisent et s'entrecroisent pourchassant les avions ennemies, les abattant souvent en un bruit assourdissant dans un nuage de fumée et de flammes.Je suis si jeune , que ces horreurs me glacent de peur mais ... me ravissent.- Souvent Papa fait des courses de nuit; Je revois encore maman, arpentant les pièces de long en large folle d'inquiétude. Il faut dire que mon père non seulement t doit braver les bombardements, mais aussi l es malfaiteurs voulant l' assassiner. Une certaine nuit particulièrement claire, il vit l'ombre du gars le couteau à la main prêt à l'égorger.- Il y eut aussi des circonstances particulièrement cocasses.Un jour une Tante de maman plutôt snob et "collet - monté," se pointa là la maison pour le déjeuner. Papa était là, attendant avec impatience son départ, quand elle di t " tient ! il y a juste un taxi devant la porte, je vais le prendre pour aller à la gare ". Mes parents ne voulant pas avouer ( on se demande bien pourquoi ) leur situation ne savaient plus "où se mettre ". Maman a souvent des prémonitions protectrices. Tous les jours elle me fait jouer à Belle - Vue, s'assayant toujours sur le même banc . Un après midi, sans aucune raison et malgré mes gérémiades et un beau soleil , pas moyen d e la faire sortir. Le lendemain, ...à notre place habituelle. ....un énorme cratère de plusieurs mètres de diamètre et d' épaisseur ! j' en ai encore la chair de poule. Mon Père de temps en temps nous fait partir pour Cognac ,afin d' y trouver peut- être ,un peu plus de calme. Mais ça ne rate jamais, notre train est toujours bombardé ! À la grande frayeur de maman. Pour moi aller , rue MAGDELEINE est un grand plaisir .Tout d'abord, l' arrivée en calèche attelée de deux chevaux fringants dont les fers , glissant sur les vieux pavés, font jaillir des étincelles. Nous arrêtons devant la lourde porte cochère à deux battants en chêne massif , décorée en son centre d'un lourd anneau en fer forgé. A droite, dans l' angle supérieur la GARGOUILLE - Une tête de vieillard artistiquement sculptée, plus grande que nature, crache l' eau de pluie accumulée dans les gouttières. Le cocher hèle le domestique qui nous ouvre. Nous descendons sous un large porche pouvant nous abriter de la pluie.Le Château se trouve en face faisant angle avec sa belle et grande tour rectangulaire en son centre. L'entrée se trouve là avec quelques marches à gravir. Mais ce qui surprend le plus c'est " la gloire de ma Grand-Mer " un énorme bouquet de bambous de belle taille, assez exceptionnelle dans ce climat des Charente. Les troncs sont si épais, que nous aimons , mes cousins et moi, nous y perdre en j ouant aux explorateurs..Il y a aussi un bassin fait de rochers artistiquement disposés. Malheureusement, mes sacripants de cousins trouvent un malin plaisir à pêcher les plus beaux spécimen de poissons qui évoluent avec grâce au milieu d 'algues aux couleurs irisées et changeantes.
J'en pleure de rage ! |
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